« quelque part, à mi-chemin

entre le feu et la glace »

Cela faisait maintenant une semaine que Machiavel s’était réveillé sur les terres étranges de Cloud Nine. Sept jours qu’il parcourait les territoires de ce nouveau monde. Mais, parmi tous les lieux qu’il avait visité jusqu’à présent, c’était cet endroit là qui était le plus surprenant.
A sa gauche, il y avait la chaleur de l’été ; à sa droite, le froid de l’hiver. D’un côté la verdure, de l’autre la neige et la glace. Le tout sans la moindre transition et parfaitement délimité par une route rectiligne. C’était en tout point déconcertant !
L’étalon gris et or resta abasourdi devant ce paysage hors du commun pendant plusieurs minutes, planté comme un piqué au beau milieu de la route, se demandant par quel miracle tout cela était possible...

Elle restait là, alerte, les sabots enfoncés dans la neige. Un flocon se déposa sur le bout de ses naseaux et elle frémit. Observant de l'autre côté de la route ; l'été. Elle frissonna en sentant le souffle glacé contre sa peau, ses flancs. Comment était-ce possible ? Elle l'ignorait.
C'est là qu'elle l'aperçut. Un étalon gris et doré, aux cornes imposantes. La jument poussa un petit hennissement, trottinant vers lui.

Machiavel était plongé dans la contemplation du No man’s Land. Son cerveau bouillonnait en quête d’explication à ce phénomène. Immobile et impassible, il put observer des cervidés traverser rapidement la route, allant d’un côté à l’autre, du chaud au froid.
C’est alors qu’un petit hennissement le tira de ses pensées. L’étalon gris et or tourna la tête en direction de l’appel : une jument rose si dirigeait vers lui au petit trot. Machiavel l’avait déjà vue quelques jours auparavant, et il attendit patiemment qu’elle arrive à sa hauteur avant de prendre la saluer poliment :

« Bonjour Calypso. »

La jument vint rejoindre le mâle, sur le chemin entre le monde de la glace et celui du feu. A ses côtés se trouvaient d'étranges créatures, elle n'en avait jamais vu. A vrai dire, elle n'avait jamais vu autre chose que les chevaux de son élevage, sur lesquels elle régnait pleinement et imposait sa loi de sale garce. ici, tout lui échappait. Elle avait l'impression de re découvrir le monde..

'' Bonjour ''

La salua-elle doucement, s'arrêtant à sa hauteur. Sur son dos, il lui restait quelques flocons. Elle plongea ses yeux bleus dansceux dorés de l'étalon avant d'ajouter en secouant la tête, sur un ton un peu agacé.

'' As tu la moindre idée de ce qui se passe ici ?! ''

« Bonjour. As-tu la moindre idée de ce qui se passe ici ? ». La jument rose avait plongé ses grands yeux bleus dans ceux de Machiavel. L’étalon garda le silence quelques instants, l’air à la fois perplexe et perdu. C’était comme s’il était en train de se noyer dans le profond regard de Calypso… Ces yeux. Ils étaient la parfaite réplique de ceux de sa sœur, Malicia.

« Je n’en ai pas la moindre idée… »

Sa voix était rauque, et on pouvait lire le désappointement sur son visage.

Les yeux d'or de l'étalons étaient quelques peu embués, il semblait troublé. La jument pencha légèrement la tête sur le côté, cherchant à deviner la source de ceci ; de cet air perplexe et perdu..

« Je n’en ai pas la moindre idée… »

Finit-il par répondre, d'une voix rauque qui la troubla légèrement. Qu'avait-il donc ? Était-ce le lieu qui, tout comme pour elle, le perturbait ? Parce qu'il y avait de quoi, entre le côté de flamme et celui de glace.. Calypso frissonna, envoyant s'écraser à terre les quelques flocons qui restaient entremêlés à ses poils. Maintenant, elle avait froid.

'' Je ne comprend rien à ce qui se passe ici.. ''

Elle soupira doucement, en venant presque à regretter sa vie dans son haras, cloîtrée par mis les équidés dont elle était reine.

Un frisson venait à l’instant de parcourir le corps de la jument rose. Même si on aurait pu penser que la route séparant le monde du chaud de celui du froid disposerait d’une température intermédiaire et agréable, il fallait avouer qu’il y faisait plutôt froid à cause de tout ces courants d’air glacés qui allaient et venaient. D’un signe de tête, l’étalon gris et or invita la pégase rose à traverser la frontière pour se rendre sur la pelouse verte et fraiche de la partie printanière de ce territoire, et il ne tarda pas à lui emboiter le pas.
« Je ne comprend rien à ce qui se passe ici… ». Machiavel hocha la tête. Lui non plus ne comprenait rien à tout ça : au No man’s Land en particulier, et aux terres de Cloud Nine de manière générale.

« A vrai dire, moi non plus… En fait, plus les jours passent et plus les questions que je posent se multiplient sans que j’arrive à leur trouver le moindre début d’explications. »

Lorsque l'étalon lui proposa d'aller vers la partir chaude du No man's land, ou régnait en maître une agréable tiédeur et de l'herbe verte et tendre, elle ne se fit pas prier. Calypso pris donc le pas vers la zone de printemps et fut bien vite rejointe par l'étalon gris qui lui emboîta le pas.

« A vrai dire, moi non plus… En fait, plus les jours passent et plus les questions que je posent se multiplient sans que j’arrive à leur trouver le moindre début d’explications. »

La jument rose hocha la tête, tout en soupirant. Elle ressentait exactement la même chose ; ce sentiment d'ignorance et d'incompétence, l'impression d'être manipulée, d'être tombée dans un monde qui lui était étranger, qui lui donnait l'impression d'être une jeune pouliche perdue.

'' Si je tombais sur la chose qui m'a emmenée ici, je lui péterai la figure. ''

Oui, Calypso parle crument, il ne faut pas s'étonner. Elle inspira l'air imprégné de flagrances printanières qui se baladaient dans l'air, le parfum des fleurs venant lui titiller les naseaux.

« Si je tombais sur la chose qui m'a emmenée ici, je lui péterai la figure. ». Tout en suivant la jument rose, le pégase gris et or esquissa un sourire. Oui, sans pour autant aller jusqu’à se battre, Machiavel aurait surement deux trois choses à dire à l’être qui s’était permit de le retirer de son monde.
L’étalon s’arrêta et baissa la tête pour saisir quelques brins d’herbes qu’il mâcha lentement, l’air pensif.

« Tu sais, plus j’y pense et plus je me dis que, si je ne m’étais pas réveillé sur Cloud Nine, je serais surement mort à l’heure qu’il est... »

Tout en parlant, le regard de Machiavel s’assombri : il revivait mentalement la scène de son dernier combat. Il était à terre, complètement épuisé, et son adversaire abattait avec une force incroyable les sabots de ses deux antérieurs sur le sommet de son crane. Ce coup fatal aurait dû mettre instantanément un terme à sa vie, le pégase en était certain. Et pourtant, il était là…

« Alors je crois que se retrouver ici, dans ces corps qui ne sont pas les notre et sur ce monde plus qu’étrange, ce n’est peut être une malédiction. Du moins, pas tant que ça… »

Elle afficha un air fier et sûr d'elle, tout en énonçant à haute voix que si elle trouvait celui qui lui avait infligé cette malédiction, elle prendrait un certain plaisir à lui démonter la figure. Néanmoins, elle était faible. Ce n'était qu'une rose avec quatre épines, persuadée de pouvoir dominer le monde et combattre les tigres du haut de sa petite tige verte.

Les paroles de l'étalon la firent stopper net sa marche. Elle répondit ;

'' Peut être, Machiavel. Mais ce qui est ici, tout ce qui est là, sous notre nez, - elle désigna alors l'herbe sous ses sabots, les créatures inoffensives qui courraient en troupeau, - ce qui est là n'est pas chez nous. Ce n'est pas chez moi, tu comprend ? ''

Elle ruminai des pensées sombres au goût amer. Sa vie d'avant n'était peut être pas la vie rêvée, mais au moins, elle ne ressemblait pas là bas à une chose inoffensive qui ne connaissait rien du monde. Ici, tout la surprenait.

« Peut être, Machiavel. Mais ce qui est ici, tout ce qui est là, sous notre nez, ce qui est là n'est pas chez nous. Ce n'est pas chez moi, tu comprends ? ». Bien sûr qu’il comprenait. Lui non plus il n’arrivait pas à accepter sa nouvelle existence. D’ailleurs, il ne faisait que broyer du noir depuis son arrivée inexpliquée dans ce monde inconnu. Mais au fur et à mesure que les jours passaient, sa nature reprenait le dessus : Machiavel était un étalon plein de vie et insouciant et, même s’il connaissait des jours sombres en ce moment, il restait inchangé.
L’étalon gris et or hocha la tête tout en regardant Calypso avec un petit air triste.

« Je sais bien… »

Il marqua une pause et soupira.

« Mais je suis fatigué de me morfondre et de chercher à tout prix un moyen de partir d’ici… Je préfère positiver et me dire qu’être ici, même si ce n’est pas chez moi, vaut mieux que d’errer dans le néant. »